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Un graveur tout court, dans la quincaillerie cyber, est un graveur de disque compact. Physiquement, il ressemble tout-à-fait à un lecteur de cd-rom, mais un lecteur qui ne fait pas que lire, car il enregistre aussi. C'est un objet récent : ses premiers modèles datent de 1997, mais il n'a commencé à se répandre parmi les PC qu'en 1999. Depuis que ses performances (sa vitesse de gravure) se sont améliorées et ses prix écroulés, il connaît un succès remarquable, qui s'explique par deux causes. Le première c'est que le graveur est au piratage ce que le pollen est aux plantes. Logiciels, morceaux de musique, et même films, leur trafic obéit à cette loi: on surfe d'abord, on grave ensuite. Mais il y a une autre raison plus générale, propre aux supports de stockage de l'information pour le grand public. Ce dernier n'aime pas les lecteurs seuls : les magnétoscopes, qui servent avant tout à lire, ont pourtant du leur succès au fait qu'ils pouvaient enregistrer. Plus tôt, le marché avait boudé les simples lecteurs de cassettes audio, même beaucoup moins chers que les enregistreurs. Scénario identique pour le mini-disc. La possibilité d'enregistrer, ce n'est pas que celle de copier, c'est aussi la promesse plus vague de créer, de stocker, c'est la liberté. Les graveurs étaient donc promis au succès. Le français, avec graveur, a suivi toutefois une voie originale. En Amérique, on dit un cd-writer, un écriveur de cd. Nous aurions pu dire aussi enregistreur de cd, et cela a été tenté par Philips dans sa version "chaine Hi-Fi" spécialisée pour les cd audio. Mais c'est graveur qui s'est imposé, avant tout parce que nous n'avons pas totalement confiance dans l'informatique. Graver vient du germain graban, qui voulait dire creuser (graben, la tombe en allemand). Dès le 16° siècle, graver veut dire rendre durable. C'est que ce qui est gravé l'est avant tout dans le temps. Et cette ancienne connotation s'est retrouvée dans un vocabulaire qui dit aussi sauver pour le fait d'enregistrer un fichier (sur le disque dur). Les entrailles de l'ordinateur sont traîtresses, ce qui y habite est précaire, pour ne pas parler du réseau, trop virtuel. Ce qui va durer, ce qu'on veut transmettre, on doit le graver, non plus dans le marbre, mais sur un CD. On peut trouver une justification technique au mot en observant que le rayon laser du graveur, en brûlant la surface du cd vierge, creuse de petites coupelles (mais alors vraiment petites) qui vont permettre de coder l'information. Ou faire remarquer l'analogie avec la gravure d'un disque à l'époque du vinyl. Mais ces deux explications pèsent de peu de poids : les Américains aussi savent comment marche un graveur, mais s'ils disent parfois brûler un CD (to burn), ils ne disent jamais graveur. Et quand au disque vinyl, c'est précisément pour s'en différencier que s'est constitué tout le vocabulaire du CD. Non, la seule vraie explication est dans cette pirouette d'histoire de l'art: le plus célèbre graveur s'appelait Dürer, et de durer, c'est bien de cela qu'il s'agit. |
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